Crise d'identité des enseignants
Nicolas Sarkozy est d’abord parti du postulat que les enseignants traversent une crise d’identité : «… Nous devrions avoir les enseignants les plus heureux ; or, partout où je porte mon regard, on me parle, à juste titre, d’une crise d’identité pour le monde enseignant … » . Façon habile de donner le sentiment de prendre le parti des enseignants et de laisser supposer qu’il va pallier ce qu’il appelle leur « crise d’identité » par des dispositions adéquates.
En réalité, et alors précisément que c’est la dénaturation de leur métier par la révolution au sein de l’école qui les déstabilise – d’enseignants ils se trouvent de plus en plus métamorphosés en accompagnateurs de projets d'élèves - il ne fait ce constat que pour renforcer le dispositif et assurer la révolution complète de l’exercice de leur métier en affirmant, en fin de discours, la nécessité de « redéfinir le métier d’enseignant ».
Les trois choix de Nicolas Sarkozy...
Nicolas Sarkozy annonce trois choix pour l’école : excellence, justice, unité...dit-il
1 – Celui de l’excellence ..
« …Pas de place pour la médiocrité » n’hésite-t-il pas à affirmer ! martelant un… « il faut que chacun se persuade de cette réalité » ! ah ! mais !…sur la façon dont le système éducatif va atteindre cet objectif, il est très discret et on le comprend !
Il serait tout de même très intéressant que Nicolas Sarkozy nous dise comment il va être possible d’atteindre cet objectif d’ « excellence » qu’il prétend poursuivre dans le système éducatif en cours de « refondation » qui consiste à détruire tous les fondements d’une véritable institution scolaire pour la transformer en lieu de vie , puisque cette refondation repose sur la disparition des cours remplacés par des activités aux appellations diverses et variées pour donner une apparence de crédibilité au système « - itinéraires de découverte, accompagnement personnalisé, projet personnel de réussite éducative, travaux personnels encadrés… » , activités choisies par l’élève au cours desquelles il est censé construire son savoir dans différentes disciplines à la fois, et sans qu’il y ait obligation de résultat, dans le cadre de projets d’établissement à partir de thèmes définis au niveau national.
Le système repose donc sur le principe d’une obligation de moyens, sans obligation de résultat, ce qui représente une logique exactement inverse de celle d’une institution scolaire qui repose sur le principe d’une obligation de résultat sans obligation de moyens.
Alors, pour Nicolas Sarkozy, qu’en est-il de l’excellence dans cette « école », lieu de vie ? Pas facile ! mais, qu’à cela ne tienne ! Nicolas Sarkozy a de la ressource : il nous entraîne tout de suite dans le monde enchanteur des universités, de l’acquisition de leur autonomie et des avantages qu’il est possible d’en retirer, des ressources affectées, du renforcement des liens, dit-il, entre recherche et universités et des milliards qui y sont consacrés concluant par « d’ici à 5 ans, nous aurons en France, un nombre significatif d’universités de dimension mondiale » !
Certes, dans le cadre du mondialisme dont il veut nous faire avaler toutes les couleuvres, les universités françaises seront forcément de dimension mondiale, mais à quelle place ? La même que celle révélée dans l’étude PISA 2010 selon laquelle les collégiens français de 15 ans sont relégués à plus de la vingtième place dans les disciplines fondamentales : langue maternelle, maths, sciences ? .. . ou bien, en queue de liste ? ou encore – ce qui est le plus probable - … hors concours ? puisque, dans le cadre de la refondation de l'Ecole, la réforme du lycée 2010 conduit à la suppression des cours pour les remplacer par des activités sans obligation de résultat; il est donc permis de se poser la question de savoir, non seulement dans quel état les lycéens vont "débarquer" dans les universités mais également dans quel état les "étudiants" qu'ils seront censés être devenus , vont en sortir quand, dans le prolongement des dispositions relatives au lycée, la logique universitaire tend de plus en plus à faire réaliser de la recherche (sic) au détriment de l'enseignement disciplinaire.
Poursuivant la lecture du discours de Nicolas Sarkozy…
2 – Choix de la Justice...
– « Cette réalité prépare le 2ème choix que nous avons fait : celui de la justice »
«… L’inégalité la plus choquante, elle (sic) n’est pas dans l’écart de richesses, elle est entre celui qui a pu faire de bonnes études qui le préparent à un bon avenir professionnel et celui qui n’a pas eu ce patrimoine… »
Ah ! bon ? mais…aujourd’hui, tous les enfants vont à l’école ! dans un système éducatif performant, l’enfant qui en a les capacités et reçoit un enseignement de qualité réussit, quel que soit son milieu social ; nous en avons eu maintes preuves quand notre Institution scolaire "tournait rond", mais dans un système déficient tel que le nôtre aujourd’hui, la différence de résultat ne repose pas sur celui qui peut faire ou celui qui ne peut pas faire de bonnes études dans l’enseignement public ou privé sous contrat, mais au contraire, uniquement sur les moyens financiers des parents, ceux qui ont les moyens d’offrir des cours de soutien à leurs enfants et ceux qui ne les ont pas: il se produit donc exactement l’inverse de ce que prétend Nicolas Sarkozy.
Mais, cette déclaration n’est pas faite innocemment ; elle est destinée à justifier une inégalité de traitement au bénéfice des populations des banlieues. En effet, Nicolas Sarkozy poursuit : «…Au nom d’une fausse conception de l’égalité, on avait fini par croire que le rôle de l’Education Nationale était de donner la même chose à tout le monde, je voudrais dire qu’avec cette idée de donner la même chose à tout le monde, ce sont les éléments les plus défavorisés qui sont lésés… ».
En réalité, Nicolas Sarkozy prétend« qu’au nom d’une fausse conception de l’égalité , on avait fini par croire que le rôle de l’Education Nationale était de donner la même chose à tout le monde » alors que le système était diversifié dans l’institution scolaire telle qu’elle existait mais aujourd'hui, c’est précisément le système en "refondation" qui tend à donner la même chose à tout le monde et «… en donnant la même chose à tout le monde … », ce ne sont pas les éléments les plus défavorisés qui sont lésés, c’est forcément l’élite qui est lésée puisque, dans ce cas, le système est obligé de se baser sur le plus petit commun dénominateur pour que tout le monde y ait accès : c’est celui que Nicolas Sarkozy met en oeuvre par le fait de transformer l’institution scolaire en lieu de vie où l’instruction n’est donnée à personne.
Le scandale des internats d’excellence
Cette contre-vérité va permettre à Nicolas Sarkozy de justifier l’exception de la mise en place des internats d’excellence réservés uniquement aux enfants des banlieues, ce qui représente un véritable scandale contre lequel nous devons impérativement nous battre en exigeant, pour nos enfants, les moyens de la liberté scolaire afin qu’ils ne soient pas volontairement abêtis par ce système en "refondation".
Scandale, pourquoi ? parce-que, dans ces internats d’excellence réservés aux enfants des banlieues majoritairement constitués d’enfants étrangers, est dispensé un véritable enseignement de qualité , enseignement assuré par un personnel sélectionné, dans des classes à petits effectifs, avec une discipline rigoureuse, dans un objectif d’excellence des résultats, c’est-à-dire qu’ est dispensé à ces enfants ce qui est refusé aux nôtres puisque, contrairement au système éducatif en "refondation" qui crée des obligation de moyens sans obligations de résultat, la philosophie de ces établissements est la recherche de l’excellence des résultats, sans obligation de moyens, ce qui est, bien entendu, la philosophie d’une véritable institution scolaire.
Un lieu de vie pour nos enfants, une véritable école pour les enfants des banlieues : voilà le scandale, un vrai scandale dont il faut bien saisir la portée considérable : l’objectif étant que ces enfants, étrangers à notre culture, deviennent l’élite de la Nation et que nos enfants en deviennent les larbins.
Des structures de soutien pour ces enfants, telles des études surveillées, seraient bien entendu acceptables, mais dans le système refondé par Nicolas Sarkozy, il n’y a pas de justification à l’organisation d’études surveillées puisqu’il n’y a pas de résultat à atteindre..
Il ajoute : « … il faut donc changer nos façons de voir ; accepter, au nom de l’égalité, de traiter différemment celui qui est différent. Je répète, au nom de l’égalité, traiter différemment celui qui est différent. C’est cela l’égalité et c’est cela la justice… »
Cette calamiteuse situation constitue une justification supplémentaire à ce que nous exigions les moyens de la liberté scolaire pour nos enfants.
3 - Choix de l’unité...
« …Le 3ème choix, c’est l’unité, parce-que c’est le meilleur rempart contre la tentation du repli sur le communautarisme … »
Nicolas Sarkozy n’hésite pas à affirmer : « Nous voulons que l’Ecole soit le creuset de la Nation ».
Nous aimerions savoir comment l’école peut être le creuset de la Nation quand les établissements scolaires deviennent autonomes sans obligation de résultat. Peut-on encore parler d’école et, a fortiori, d’école de la République, creuset de la Nation ?
Nicolas Sarkozy poursuit son discours : «… Non seulement l’institution scolaire a de plus en plus de mal à partager un modèle commun, mais elle est elle-même la première victime de ce qu’il est convenu d’appeler la « perte des valeurs ».
Il ne faut pas manquer d’audace ! Qui a fait perdre les valeurs à notre société ? Qui a remis en cause les valeurs de la République ? Qui a mis en œuvre des méthodes pédagogiques ineptes qui perturbent la structuration de l’intelligence et de la personnalité des enfants ? Qui a remis en cause les vertus éducatives du savoir, de l’autorité, du travail, de l’effort, des nécessaires contraintes, des sanctions, de l’indispensable sélection ? Qui a remis en cause ces valeurs qui avaient la gloire de notre instruction publique ? Qui, depuis 1968, a fustigé les enseignants qui voulaient préserver ces valeurs au sein même de l’institution scolaire ?
Nous avons les fruits d’un système éducatif subverti depuis plus de 50 ans et, que fait Nicolas Sarkozy pour y remédier ? Il aggrave la situation en poursuivant la mise en œuvre d’un système sans repères pour l’enfant. Comment l’enfant va-t-il se construire dans une institution à but ludique et récréatif ? va-t-on former des citoyens avisés, des professionnels qui apprennent les exigences du travail ? C’est un système qui détruit les potentialités de nos enfants, qui détruit aussi celles de notre société : l'unité de Nicolas Sarkozy, c'est l'abrutissement généralisé.
Et il ose ajouter : «… alors, comment répondre à cette crise des valeurs ? ...La meilleure éducation commence par l’instruction, c’est d’abord par son savoir que le professeur inspire le respect aux élèves qui lui sont confiés, le peu d’estime dans laquelle il a été tenue au cours des dernières décennies, l’abaissement du niveau d’exigence à l’école, ont beaucoup fait pour saper l’autorité des enseignants. C’est une des raisons pour lesquelles les programmes de l’école primaire ont été réécrits, il faut donc réhabiliter le savoir… »
…Nicolas Sarkozy fait exactement l’inverse : le système en "refondation" balaie le savoir transmis par le professeur.
Et, pour justifier ce qu’il appelle « la redéfinition du métier d’enseignant et la réforme de l’appréciation des enseignants »,il poursuit « mais nous savons que cela ne suffira pas, les élèves ont changé radicalement… Ce n’est donc pas en revenant purement et simplement aux pratiques du début du siècle dernier que l’on retrouvera un âge d’or au demeurant souvent idéalisé des premiers temps de la république…Les élèves ont changé, pas l’école, en tous cas pas suffisamment, voilà, à mon sens, un problème dont nous devons nous saisir dans deux directions : redéfinir le métier d’enseignant et le projet de réforme de l’appréciation des enseignants.
Affirmations radicalement opposées à la réalité : c’est l’institution scolaire qui a changé et, parce-qu’elle a changé, qu’elle ne répond plus aux exigences d’une école, que les enfants ont un comportement modifié : le changement de leur comportement est une conséquence et non une cause car, dans les écoles où se pratique un enseignement basé sur l’instruction et sur les résultats à atteindre, quelles que soient les méthodes utilisées, l’enfant reste inchangé : il a soif d’apprendre, il a soif de connaissances dans la mesure où ses potentialités n’ont pas été étouffées voire déviées par le système scolaire et il respecte ses maîtres.
Mais si Nicolas Sarkozy prétend qu’il faut changer le métier d’enseignant pour pallier les difficultés c’est uniquement pour justifier la révolution de la fonction d’ « enseignant » en raison de la « refondation » de l’école en lieu de vie, et alors même que cette révolution va aggraver la situation; les résultats catastrophiques sont déjà probants et les enseignants n’ont pas choisi ce métier pour être accompagnateur de projet mais pour enseigner.
CONCLUSION
Alors ? que conclure ?
Que Nicolas Sarkozy sait parfaitement ce qu’il fait : sa meilleure arme pour subvertir l’institution scolaire en anesthésiant la vigilance des Français, c’est la désinformation : il en use , il en abuse, il abuse les Français pour poursuivre sans état d’âme la destruction de l’Institution scolaire et par là même, la destruction des fondements de notre civilisation.
A nous d’être vigilants et d’exiger la seule voie de salut : les moyens de la liberté scolaire pour tous les enfants.